Le message du pasteur sur

Colossiens 3. 12-17 

6e dimanche après la Trinité

 

 Frères et sœurs, la période présente peut offrir la possibilité de faire une halte, une ’’pause estivale’’ comme on dit, pour méditer un instant avant de reprendre le collier. Les enfants sont au camp, le couple souffle un peu, il y a enfin du temps pour se poser. Et de rendre grâces, de compter les faveurs de notre Dieu pendant les onze mois que l’on vient de traverser… Il me semble que ce beau passage de l’apôtre Paul peut nous y aider, et représenter pour chacun de nous une source de bénédiction en ce mois d’été. 

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La première action de grâces, évidemment, c’est de connaître Jésus, le savoir aux commandes de notre vie et au centre de notre foyer. Il a choisi lui-même cette relation. C’est à cela, en tous cas, que Paul songe en premier : vous avez été "choisis par Dieu" (v.12). Quel privilège, en effet, d’appartenir au Seigneur ! Il est le créateur de la vie, et c’est un point que savent méditer tous les parents chrétiens. Ils se souviennent avec émotion de la naissance de chacun de leur enfant et des circonstances, heureuses ou douloureuses, de chaque accouchement. Eh bien ! De la même manière, non seulement Dieu nous a connus par avance mais il en conserve dans son cœur les moindres détails. Ainsi, David chante au psaume 139ème : "C’est toi qui as formé mes reins, lorsque j’étais caché dans le sein de ma mère ; je te loue de ce que je suis une créature si merveilleuse, tes œuvres sont admirables !" 

La naissance d’un enfant, c’est tellement normal, tellement naturel que nous oublions souvent de faire le premier geste que Dieu attend des croyants dans ce monde : joindre les mains, dire ’’merci’’ pour ce miracle de la création… 

Dieu est l’auteur de la vie, il est aussi l’auteur du mariage. Le couple apparaît dès le chapitre premier de la Genèse. Le passage dit ceci : "Dieu créa l’homme et la femme. Dieu les bénit et leur dit : reproduisez-vous, devenez nombreux, remplissez la terre et soumettez-la". Dans ce texte, il est simplement question de fécondité, pour qu’Adam, Eve et leurs descendants puissent perpétuer le genre humain. Mais il serait difficile d’en obtenir une définition solide du mariage. On pourrait même conclure que l’homme et la femme peuvent vivre leur sexualité comme ils l’entendent, mariés ou non.

C’est pourquoi le chapitre suivant revient sur la relation entre Eve et Adam ; l’Éternel tient à préciser une fois pour toutes que la fécondité et la sexualité doivent s’exprimer dans le cadre du mariage. Dieu définit le mariage de la manière suivante : "L’homme quittera son père et sa mère et s’attachera à sa femme, et ils ne feront qu’un". Et Jésus, reprenant cette déclaration, conclut : "Que l’homme ne sépare pas ce que Dieu a uni". Même si ce texte manque d’un certain charme, ce qui explique peut-être qu’on ne l’entend plus beaucoup par rapport à d’autres (plus prisés, lors des mariages) il en est pourtant le fondement, avec tout ce que cela implique d’amour, de fidélité et …de clarté.

Dieu est le créateur de la vie, il a institué le mariage ; il est aussi l’auteur de mon salut. Vous êtes saints écrit Paul à la suite de son introduction (v.12). Savez-vous que cette paroisse de Colosses n’était pas un modèle… de sainteté ? Tous les commentateurs sont d’accord là-dessus : on a l’impression qu’un mauvais orage est passé sur l’Église. On s’y est disputé. La lettre de l’apôtre est donc là pour soigner, pour éveiller les consciences, pour faire réagir… 

Et pourtant, malgré leurs travers, ces chrétiens sont appelés saints. Comment cela ? C’est encore un don de Dieu. "C’est par la grâce que vous êtes sauvés, déclare Paul aux Églises, par le moyen de la foi. Et cela ne vient pas de vous, c’est le don de Dieu. Ce n’est pas par les œuvres, afin que personne ne puisse se vanter" (Ep 2). Tout est là ! Dès lors, celui qui connaît Christ n’est plus du monde. C’est le sens biblique de la sainteté : arraché du monde et du péché, mis à part pour servir Dieu et témoigner de la vérité. Où donc ? Dans le monde, bien sûr ! Et le monde commence au sein de mon couple, auprès des membres de ma famille, du cercle plus étendu de mes relations amicales et professionnelles. "Ma parole vous a rendus purs" dit Jésus. Personne n’est exclu de ce plan de grâce. Pour preuve cette déclaration célèbre : « Dieu a tant aimé le monde, qu’il a donné son Fils unique, afin que quiconque croit en lui ne périsse pas, mais ait la vie éternelle » ! Voici la Bonne Nouvelle de l’Évangile, l’annonce pour tous qu’un nouveau départ est possible quand on écoute la parole de Dieu et la garde dans son cœur. 

Nous devons à cette sainteté d’être intégrés dans l’Église, écrit Paul, d’appartenir au peuple de Dieu "pour former un seul corps" (v.15). L’apôtre revient souvent sur cette comparaison : ’’En Christ, tu es uni à moi, mon frère, ma sœur, comme les membres d’un même corps’’. Bien plus, Christ est Chemin, Vérité et Vie : toute chose trouve en lui sa cohésion. Alors oui, l’Église est appelée à faire corps en communion avec son chef (sa tête !) le Christ ! Nous sommes tous nés d’un même sacrement, le baptême ; nous communions tous au même pain et au même vin ; nous adorons comme ce matin le même Seigneur pour exprimer la même foi. 

Dans la Bible, Dieu appelle l’Église "sa bien-aimée". Et ici aussi, voyez : "En tant qu’êtres choisis par Dieu, saints et bien-aimés(v.12). Le couple a-t-il besoin d’amour pour résister au temps ? Certainement ! A combien plus forte raison sommes-nous appelés à saisir cet amour donné en abondance, pour le rapporter chez nous, dans nos familles, dans nos maisons, au sein de notre couple pour en faire quelque-chose de vraiment fort et durable. 

Chère assemblée, s’il est vrai que cette lettre de Paul résonne comme un appel pour tous ceux qui l’entendent, qu’en est-il de vous ? Connaissez-vous toutes ces richesses dont Dieu souhaite vous combler ? En particulier si vous êtes jeunes, votre manière de vivre suit-elle sa volonté ? Ce matin peut être une invitation de la part du Seigneur à vous poser cette question essentielle ! Et peut-être de reprendre avec lui le chemin de l’obéissance, ou de l’espérance…

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Avons-nous tout dit ? Tout-il est fini ? Non ! En réalité, ce n’est que le point de départ ! Ce que nous avons reçu, nous pouvons le donner à notre tour. C’est toute la force du message de Paul -et de la Bible en général. Notre vie chrétienne découle du pardon reçu : l’Esprit met en nous le désir d’imiter notre Sauveur, et nous fait rechercher les dons qui viennent de lui. 

"Revêtez-vous de sentiments de compassion", conseille Paul (v.12). Nous sommes bien-aimés, c’est-à-dire que le Seigneur éprouve à notre égard des sentiments paternels. Eh bien voyez, "compassion" désigne l’attendrissement que l’on éprouve pour un enfant, par exemple, ou pour quiconque est dans la peine, ou la détresse. La compassion, c’est le contraire de l’indifférence. C’est une bonté attentive, une souffrance étrangère que l’on accepte de prendre sur soi. 

Rien d’étonnant alors que l’humilité soit également citée… Dieu sait combien de couples se déchirent parce qu’ils n’ont pas su vivre de respect et d’estime réciproque. Un couple est par définition l’assemblage le plus mystérieux qui soit, puisqu’il unit deux êtres aux fonctionnements physiologiques et psychiques très différents. Chacun apporte sa particularité. 

Mais depuis plusieurs générations, le défi est encore devenu plus passionnant avec l’accès des femmes aux professions et aux responsabilités les plus diverses. De sorte que le couple, ce corps unique à former selon l’expression même de Dieu, devra se composer d’expériences, de parcours très différents, d’attentes tout aussi légitimes de part et d’autre… L’un évoluera peut-être professionnellement plus rapidement, consacrera ses soirées aux cours du soir, se laissera happer par un nombre sans cesse croissant de responsabilités, ce qui pourra isoler l’autre et générer des tensions… Malheur au couple qui ne saurait alors plus se parler, accorder ses visions, se tenir fermement la main et partager ces fruits de l’Esprit que sont le respect, l’estime réciproque et l’humilité…

Paul associe la patience à ces valeurs chrétiennes. C’est un point beaucoup plus important qu’on ne le pense. De la patience, il en faut partout où des hommes se côtoient, travaillent et vivent ensemble. Bien des blessures, bien des déchirures pourraient nous être épargnées si nous savions faire preuve d’un peu plus de patience. On pèche souvent par impatience. A combien plus forte raison cette vertu est-elle à cultiver dans le couple ! En effet, avec qui sommes-nous appelés à vivre aussi longtemps …qu’avec notre conjoint ? Avec ses manies, ses travers, les aspérités de son caractère... Il est si facile de tout casser quand l’usure a fait son travail et que la patience est à bout. 

Voici justement pourquoi Paul écrit à l’Eglise : "Supportez-vous les uns les autres et, si l’un de vous a une raison de se plaindre d’un autre, pardonnez-vous réciproquement" (v.13). Chers amis, il ne peut pas donner, celui qui n’a jamais reçu. Et il ne peut pardonner, celui à qui l’on n’a jamais pardonné ! Je ne pourrai vivre en couple dans un esprit de pardon mutuel (ce qui est tellement contraire à mes dispositions naturelles) que si le Christ et son pardon ont pris pleinement possession de moi ! C’est pourquoi Paul ajoute : "De même que Christ vous a pardonnés, pardonnez-vous aussi" (v.13) ! Alors la paix et l’amour de Christ, auxquels nous avons été appelés pour former un seul corps, peuvent régner dans nos cœurs. 

Et combien de patience aussi faut-il tout au long des années, quand viennent les enfants ! On a beau être sanctifié, certains jours on ne sait plus quoi en faire. Les parents connaissent bien ces moments où ils sont désemparés par la conduite d’un enfant. ’’Qu’est-ce qu’on a fait au bon Dieu !’’ Ils ne savent plus s’il faut sévir ou se taire, s’il faut agir ou laisser faire, s’il faut punir ou consoler. Est-on parfois trop sévère ou trop doux ? Comment savoir ? Oui, il arrive que dans bien des situations, on ne sache plus quoi faire. Et quand on ne sait plus quoi faire, on est malheureux. 

Quelle est douce alors cette paix profonde, don du Christ et fruit de l’amour qui pardonne, oublie, espère, supporte tout, et ne soupçonne même pas le mal –comme le dit l’hymne célèbre de Paul aux Corinthiens. Une paix qui permet d’aller de l’avant, en dépit des drames, des épreuves embusquées au coin de l’existence. Une paix, comme bien suprême, promise aux chrétiens. Elle seule compte, et c’est de sa présence, ou de son absence, que dépend finalement la survie du couple, de la famille et de l’Église.

C’est pourquoi l’apôtre achève ses recommandations par une consigne précise : « Que la parole de Christ habite en vous dans toute sa richesse » ! Moi, cela me rappelle l’ordre du Seigneur, le jour de son Ascension : "baptisez toutes les nations et enseignez tout ce que je vous ai prescrit"… Chaque chrétien, et en particulier chaque famille chrétienne sont appelés à entretenir la foi par une relation étroite avec la parole de Dieu. Si l’amour a fait son œuvre, l’amour vit aussi de reconnaissance. Pour que l’amour survive, il n’est qu’un remède : "que la parole de Christ habite en vous dans toute sa richesse" (v.16). Que cette richesse, frères et sœurs, devienne votre pain quotidien, et que la parole du Seigneur soit votre véritable trésor, qu’elle soit la boussole de vos foyers. Une présence vivante qui vous incite à vous conduire à l’exemple de Christ, parce qu’en ouvrant la Bible en famille, vous êtes en présence de Dieu. 

Voilà pourquoi il ne faut plus se contenter des bribes de la connaissance religieuse qu’on a toujours crue suffisante, mais désirer accroître ce que l’on sait déjà et parvenir à la maturité spirituelle dont nous avons tous besoin. 

Puisse ainsi le Seigneur déverser sur chacun de nous une riche mesure de sa grâce et de sa bonté, nous bénir dans notre vie de couple et bénir nos enfants. Regardez votre Bible comme la parole de votre meilleur ami, de votre Sauveur miséricordieux, de votre souverain juge. 

Qu’elle habite en vous abondamment, afin que vous sachiez en appliquer les différentes portions aux différentes situations de votre vie et aux besoins divers de ceux qui vous entourent ; afin aussi que vous sachiez la présenter à Dieu dans vos prières pour en demander l’exaucement ; qu’elle forme vos jugements et règle vos désirs ; qu’elle élève vos espérances et éclaire votre conscience ; qu’elle vous rende capable de résister à Satan, de vaincre le péché et de soutenir celui qui est abattu.

Donnez à la parole de Dieu la meilleure place dans vos pensées et dans votre vie ; qu’elle soit la lampe de vos pieds et la lumière de vos sentiers ! Amen.